Foot Mercato : Pouvez-vous nous présenter brièvement l’AS SAINT-PRIEST, dont vous êtes le directeur sportif ?
Robert Mouangué : L’AS SAINT-PRIEST a été fondée en 1945, et nous fêterons cette année nos 80 ans. Situé dans la banlieue LYONNAISE, notre club évolue dans une ville de 45 000 habitants. L’ASSP se distingue par son positionnement élite, avec toutes nos équipes évoluant au moins au niveau de la Ligue. Nos U17 et l’équipe première jouent en National. Depuis quatre ans, nous avons une section sportive au lycée, désormais labellisée Sport Étude. Cela permet à nos licenciés U16, U17 et U18 de bénéficier d’horaires scolaires aménagés grâce à nos cinq lycées partenaires. Ils s’entraînent quotidiennement, du lundi au vendredi, avec leur encadrement, comme dans les clubs professionnels. Nous offrons également le même type de contenu pédagogique, avec des analystes vidéo intégrés aux staffs, des outils tels que des GPS, et une salle de musculation. Comme vous pouvez l'imaginer, ce dispositif représente un coût important. Toutefois, pour maintenir la qualité de notre formation, l’ASSP doit continuer d'avancer. Nous souhaitons voir nos U18 accéder au niveau U19 Nationaux d’ici la fin de la saison. Ils occupent actuellement la première place du championnat avec 15 points d’avance sur le deuxième. Nous devons remporter un match de barrage contre le champion de l’autre poule de Rhône-Alpes pour y parvenir. Notre équipe Futsal Seniors est aussi en tête de sa poule et bien positionnée pour accéder à la D2 professionnelle. De plus, elle est qualifiée pour les quarts de finale de la Coupe de France, où elle affrontera NANTES samedi soir. Sur le plan régional, d'autres équipes du club sont également en tête de leur poule et en lice pour monter, notamment la réserve Seniors, les Seniors 1 féminines, et la réserve U18 F. Cette saison est particulièrement passionnante, et nous espérons qu'elle se terminera positivement. Cela rend l’ASSP très attrayante. Nous sommes d'ailleurs reconnus en Rhône-Alpes et même en France pour la qualité de notre formation. De nombreux joueurs et joueuses évoluent aujourd'hui au sein de clubs pros, notamment en Ligue 1 et Ligue 2. Parmi les noms marquants des dernières années, on trouve NABIL FEKIR, TIERNO BARRY, GEORGES MIKAUTADZE, RAYAN CHERKI, ainsi que les frères KALULU. Côté féminin, il y a également les sœurs CASCARINO, ÈVE PERRISSET, et CHLOÉ D’ABADIE. Cela fait du beau monde, n'est-ce pas ?
FM : Effectivement, la liste est impressionnante. Comment qualifieriez-vous les relations entre l’OL et l’ASSP ?
R.M : Ces dernières années, malgré notre partenariat, les relations avec l’OL étaient très limitées. Comment multiplier les liens avec plus de 50 partenaires ? Du côté de l’AS MONACO, nous sommes le troisième club amateur partenaire, ce qui témoigne d’une réelle considération pour nous.
FM : Quel était le cadre de votre collaboration avec les GONES ?
R.M : Le fonctionnement était le suivant : tant que nous étions partenaires de l’OL, la priorité était accordée à ce dernier. Seul l’OL avait le privilège d’inviter nos jeunes licenciés avant le 1er janvier. C’est une règle inscrite dans notre charte, connue de tous nos licenciés. À partir de cette date, d'autres clubs professionnels pouvaient inviter nos jeunes joueurs pour des essais, mais sous certaines conditions. Ces conditions, respectées par la majorité des clubs pros, incluent l'envoi d'un courrier d'invitation pour le jeune avec une demande d'autorisation de notre part et l'accord parental. Les dates doivent tenir compte des obligations scolaires de l’enfant et de nos compétitions. Nous nous réservons le droit de refuser un essai si certaines règles ne sont pas respectées. En tant que partenaire, l’OL avait l’avantage d’inviter nos jeunes joueurs tout au long de la saison. Cela ne sera plus le cas, car ce privilège revient désormais à l’AS MONACO.
FM : Selon vous, quoi a causé ce premier "divorce" entre vos deux clubs ? Quel a été le tournant ?
R.M : On ne peut pas vraiment parler de divorce, car il n’y a jamais eu de véritable union. L’OL a pris certains de nos jeunes sans aucune contrepartie, même pas un sac de ballons ou un jeu de chasubles. D’autres clubs pros, même éloignés, ont commencé à s’intéresser à la région rhônalpine. Plusieurs de nos jeunes ont réussi à séduire différents clubs pros et ont intégré des centres de formation. L’OL a alors perdu son monopole et est devenu moins attrayant localement qu’en 2013-2014. À partir de ce moment-là, nous avons pris conscience qu'il était temps de réagir et de ne plus nous laisser « piller » sans aucune compensation en termes d'équipements ou domaines financiers. Aujourd’hui, certains clubs pros le font, d’autres non. Tous les clubs amateurs luttent pour survivre, qu'ils aient 600, 400 ou même 1 800 licenciés. Le dilemme reste le même : rémunérer les éducateurs (tous diplômés à l’ASSP) et les joueurs de l’équipe première, distribuer des primes, et s'équiper toujours mieux...
FM : Entre 2014 et 2020, l’ASSP a été partenaire de l’AS SAINT-ÉTIENNE, ce qui peut surprendre pour un club de la région LYONNAISE. Comment s'est passée cette expérience ?
R.M : Avec les STÉPHANOIS, nous avons trouvé un relationnel très chaleureux, empreint d’humilité de leur part. Les dirigeants et d’anciens joueurs étaient toujours présents lors de nos événements, serrant des mains et discutant avec tout le monde. Cette proximité et cette humilité étaient incroyables. Cela témoignait d'un respect que nous appréciaions, au-delà des questions d’argent ou d’équipements. Cependant, il est vrai que pour un club basé en banlieue LYONNAISE, établir un partenariat avec l’ASSE, traditionnellement considéré comme "l’ennemi juré" des LYONNAIS, semblait paradoxal.
FM : Après ces années d’échanges avec les STÉPHANOIS, pourquoi l’ASSP s’est-elle rapprochée de l’OL en 2020 ?
R.M : Après quatre ou cinq ans, grâce au Maire de SAINT-PRIEST, Monsieur Gilles Gascon, qui entretenait une bonne relation avec JEAN-MICHEL AULAS, nous avons pu rencontrer les dirigeants LYONNAIS. La réunion a eu lieu au GROUPAMA STADIUM, dans les bureaux de Monsieur Vincent Ponsot, en présence de Pierre Sage et d'autres cadres techniques de l’OL. Cela représentait pour nous une réelle marque de considération. Cependant, malgré la dotation financière et le nombre de places gratuites pour les matches, nos attentes concernant les échanges et le partage de savoir-faire sont restées lettre morte.
FM : Depuis l’été dernier, vous n’avez plus de lien avec l’OL et la nouvelle direction représentée par JOHN TEXTOR. Comment en est-on arrivé là ?
R.M : Après quelques relances de notre part pour savoir si un renouvellement était envisageable, nous avons enfin eu une rencontre le 22 août. Cependant, ce rendez-vous était bien différent de celui au GROUPAMA STADIUM. Deux jeunes personnes de l’OL nous ont accueillis, sans cadre technique ou responsable de l’académie, et cela a été perçu comme un recul. Par la suite, nous avons eu plusieurs mois de silence de la part de l’OL, alors que d'autres clubs, tant français qu'étrangers, nous manifestent leur intérêt, dont l’AS MONACO.
FM : Cet entretien a clairement marqué une rupture avec l’OL...
R.M : Il faut garder à l’esprit qu’à ce moment-là, plusieurs éducateurs emblématiques de l’OL ont été remerciés, des personnes avec qui nous avions tissé des liens depuis une décennie. Ne recevant pas de retour après notre rencontre, malgré la promesse d’un compte-rendu et d’une offre de leur part, nous avons relancé l’OL fin novembre. Ils nous ont alors indiqué qu'ils étaient débordés et que cela n'était pas qu'un oubli. Nous avons interprété cela comme un manque d’intérêt. En janvier, ils nous ont contacté pour une nouvelle rencontre. Pendant ce temps, et sans nouvelles de leur offre concrète, d'autres clubs nous ont contactés puisque nous n'étions plus sous partenariat. Cela nous a permis d'envisager d'autres options. Dès nos premiers échanges avec l’AS MONACO, nous avons souhaité centrer nos discussions avec eux. Nous avons vite ressenti une connexion avec MONACO, quelque chose de spontané. Pour l'anecdote, les trois interlocuteurs de MONACO sont d'origine LYONNAISE.
FM : À vous entendre, le discours et l’attitude de MONACO ont fait une forte impression…
R.M : Nous avons rapidement réalisé que nos visions humaines et sportives respectives s'alignaient. MONACO incarne le raffinement, la sagesse, la discipline, la rigueur et un respect total. D’ailleurs, selon le sondage Ipsos 2024-25 sur la perception des clubs pros par le public, l’ASM est classé premier en termes d'image et d'attractivité. Ce n'est donc pas par hasard que nous avons été attirés par un tel club. Le savoir-faire et le savoir-être de cette prestigieuse institution nous inspirent et légitiment notre choix, d'où notre rapprochement. En voyant le contenu de notre partenariat, c'est exactement ce à quoi nous aspirions : un véritable échange de process, tant pour les joueurs que pour les éducateurs. Ils font également preuve d’une grande humilité dans leur approche. Ils se sont déplacés à six à SAINT-PRIEST pour signer le partenariat, comprenant le directeur de l’académie, son adjoint, le responsable technique de la formation, et des recruteurs. Sans que nous le leur demandions, ils ont voulu assister aux entraînements de nos équipes du Sport-Étude. Après la formalisation de notre accord, ils ont échangé avec nos éducateurs, faisant preuve d'écoute et de bienveillance, sans donner de leçons. Ils ont su séduire tout le monde, c'était vraiment une expérience enrichissante.
FM : Combien de temps va durer cette collaboration avec l’ASM ?
R.M : Nous n’avons pas défini de durée. Si des problèmes surviennent, nous prendrons le temps de nous asseoir autour d’une table pour trouver des solutions. En cas d'impossibilité de rétablir le partenariat, nous nous en séparerons, mais nous ne sommes pas limités par une date. Cela témoigne de notre volonté d’établir une relation de confiance, avec une transparence totale.
FM : Pouvez-vous nous donner des détails sur le fonctionnement de ce partenariat ?
R.M : Je leur enverrai chaque mois un tableau des sollicitations venant d'autres clubs, pour qu’ils soient informés des invitations reçues pour nos jeunes. Nous les recommanderons à nos meilleurs talents et, s'ils s'intéressent à l'un d'eux, leur approche sera empreinte de tact et de sensibilité pour ne pas laisser le joueur et sa famille s'emballer. Un essai ne garantit pas une signature. Ils ne procéderont pas à des invitations massives, mais agiront avec discernement. Chaque invitation portera sur une immersion d'une semaine complète au centre de formation et à l'internat. De plus, de nombreuses actions sont déjà planifiées, tant pour les joueurs que pour les éducateurs, incluant des partages de process, des échanges de savoir-faire, des séances cadres, et des matches amicaux. L'objectif est d'assurer une montée en compétences pour tous. Par ailleurs, un premier jeune joueur de l’AS SAINT-PRIEST, JASSIM DJELLOUL BENCHÉRIF, a récemment signé un contrat de trois ans avec l’ASM, intégrant le centre de formation dès juillet.
FM : Beaucoup de vos jeunes joueurs sont supporters de l’OL. Comment vivent-ils cette nouvelle ? Ont-ils des craintes de ne pas pouvoir rejoindre leur club de cœur ?
R.M : Avant, cela pouvait effectivement être le cas. À présent, cela semble moins vrai, étant donné les rumeurs autour de l’avenir de la préformation et de l’école de foot à l’OL. De plus, à LYON, il y a aussi de nombreux supporters du PSG et de l’OM. Quand l’OL fera une proposition à l’un de nos licenciés, celui-ci aura la liberté d'accepter ou non. Cependant, l’AS MONACO sera prioritaire dans nos recommandations. Pour garantir la pérennité de notre club sur le plan pédagogique, au niveau de nos structures et équipements, nous sommes convaincus que c'est avec l’AS MONACO que nous pourrons avancer et faire progresser nos jeunes.
FM : La porte est-elle complètement fermée avec l’OL ?
R.M : La porte est fermée concernant un partenariat officiel. Mais si un de nos joueurs désire rejoindre l’OL et que ce dernier procède, dans le respect de notre club, il n’y aura pas de raison de s’opposer à cela.
Foot Mercato : Pourquoi l’AS MONACO a-t-elle choisi l’AS SAINT-PRIEST ?
Thiago Scuro : Ce partenariat s'inscrit dans la stratégie de développement de l’AS MONACO en matière de détection, de formation et d'accompagnement des jeunes joueurs vers le plus haut niveau. C'est une collaboration gagnant-gagnant. L’objectif est d'élargir le champ d’observation de l’AS MONACO tout en partageant notre savoir-faire et les ressources dont nous pouvons faire profiter SAINT-PRIEST. Ce club, reconnu comme l’un des meilleurs formateurs de la région rhodanienne, partage nos valeurs et notre vision, ce qui a favorisé un bon terrain d’entente pour travailler ensemble. Nous croyons fermement au développement des joueurs et à leur offrir des opportunités de progression, une conviction ancrée dans l’ADN du club. Cette saison, six joueurs issus de notre centre de formation évoluent dans l’équipe professionnelle. Nous investissons dans la formation pour améliorer ce chiffre à l'avenir, car cela fait partie de notre stratégie sur le long terme. À MONACO, nous avons les conditions idéales pour l'épanouissement et le développement des jeunes. Le partenariat avec SAINT-PRIEST, dans une région reconnue pour être un vivier de footballeurs en France, s'inscrit dans cette logique. Tout comme notre partenariat avec le FC VERSAILLES, également réputé pour sa riche formation de jeunes talents.
FM : Qu’attendez-vous de cette collaboration ?
T.S : Notre volonté est de créer une relation forte avec SAINT-PRIEST. Ce partenariat vise à permettre à des profils de l’ASSP d'intégrer notre structure, mais ce n'est pas exclusif. L'ambition est d'être présents à leurs côtés et de partager nos connaissances en matière de recrutement, d'entraînement et d'encadrement des joueurs. Nous croyons beaucoup dans cette notion de collaboration et d'échanges, car nous avons également beaucoup à apprendre de SAINT-PRIEST, tout comme du FC VERSAILLES. Nous souhaitons grandir ensemble.