Sur le papier, le Portugal a accompli sa mission. Battus 1-0 au Danemark lors du match aller des quarts de finale de la Ligue des Nations, les coéquipiers de Cristiano Ronaldo ont réussi à renverser la situation en s’imposant 5-2 après prolongation devant leur public du stade José Alvalade à Lisbonne. Qualifiée pour le Final Four, la Seleção das Quinas affrontera l’Allemagne, qui a éliminé l’Italie, et peut toujours espérer soulever un trophée qu’elle a remporté en 2019 lors de la première édition du tournoi. Cependant, Roberto Martinez subit toujours des critiques. Une fois de plus, c’est la même chanson. Nommé en 2023 après le départ de l’emblématique Fernando Santos, Martinez avait déjà essuyé une vague de reproches après l’élimination du Portugal par la France en quart de finale de l’Euro 2024.
Nommé à la tête de la sélection principalement en raison de son parcours réussi avec la génération dorée belge, l’Espagnol avait pour mission de tirer parti des nombreux talents portugais pour en faire une équipe agréable à voir jouer. Mais depuis qu'il a pris les rênes, ce n’est pas vraiment le cas. Critiqué après la performance décevante face au Danemark, Martinez agace certains observateurs depuis un moment. Lors de la conférence de presse qui a suivi l’annonce de sa liste le 14 mars dernier, l’Espagnol avait affirmé qu’il envisageait de s’appuyer sur le duo Vitinha-João Neves lorsque l'un des journalistes lui avait demandé comment il comptait aborder le match contre les Scandinaves.
« J’ai déjà parlé de Vitinha. Pour moi, c’est le meilleur milieu de terrain d’Europe. Mais le parcours en sélection, c’est une affaire de groupe. Ce que nous pouvons réaliser avec des joueurs différents, dans un contexte différent. (…) J’ai été impressionné par les performances du PSG et des joueurs portugais. Mais il faut rappeler que le duo João Neves-Vitinha débute avec la Seleção et non au PSG. En juin 2024, nous les avons vus jouer ensemble au Stade José Alvalade, et il y avait une alchimie spéciale entre eux », déclarait l’Espagnol. En réalité, il a tellement ressenti cette alchimie qu'il ne les a jamais fait jouer ensemble durant l’Euro 2024. Neves n’est apparu qu’à deux reprises en Allemagne : une fois pour remplacer Vitinha (contre la Turquie, 2 minutes de jeu) et une autre fois en tant que titulaire face à la Géorgie, sans que Vitinha ne figure sur le terrain. Vous l’aurez compris, la qualification pour le Final Four n’a pas apaisé le mécontentement général autour de cette Seleção truffée de talents, mais incapable de jouer un beau football.
Journaliste pour CNN Portugal et DAZN, Sofia Oliveira s’est d’ailleurs montrée très critique envers la fédération sur son compte X entre les deux prestations de l’équipe de CR7. « Le sujet de l’équipe nationale va bien au-delà des performances médiocres d’une génération qui mérite mieux qu’un Championnat d’Europe gagné par chance. Personne ne peut s’identifier à une Fédération qui privilégie le copinage plutôt que la compétence, et dont la principale exigence envers un entraîneur est de ne pas faire preuve de colonne vertébrale afin d’accepter les décisions des autres. Les stades se remplissent, les audiences des matchs sont fulgurantes, mais l’équipe nationale d’aujourd’hui n’est rien d’autre qu’un punching-ball pour le peuple. » Aujourd’hui, A Bola a publié un éditorial de Luis Mateus, qui estime que Roberto Martinez ne sera pas celui qui permettra au Portugal de remporter une Coupe du Monde qui lui échappe depuis toujours. Martinez est accusé de faire de la politique au lieu de se concentrer sur son rôle d’entraîneur.
« Si ce n’est pas Fernando Santos, ce ne sera probablement pas l’Espagnol qui exploitera au mieux une équipe nationale pleine de talents. Malgré la qualification d’aujourd’hui, des signaux préoccupants montrent qu’ils ne sont plus qu’un punching-ball pour le public. (…) Je l'avais déjà prévenu : Martinez est un homme de consensus, pas de rupture, ce qui n’est peut-être pas dans l’intérêt de l’équipe nationale (bien qu’il ait respecté celui de la fédération). À l’instar des vétérans belges, le sélectionneur a voulu plaire à tout le monde : c’est le cas du maintien aveugle de (Cristiano) Ronaldo ou de sa résistance à intégrer d'autres joueurs. (…) Ce que Martinez a présenté au début était radical et pas toujours fonctionnel, malgré les résultats. Il n’a pas su créer une dynamique. Un entraîneur doit capitaliser sur le travail des clubs, mais cela ne suffit pas. Et, deux ans après, avec une phase finale en approche, il ne peut plus se plaindre du temps d’entraînement. La recherche d’un consensus politique a freiné le collectif. Le jeu de position est statique, sans complémentarité entre les joueurs et sans mouvement sans le ballon. (…) Mettre Bernardo (Silva) dans les duels au lieu de donner du temps de jeu aux autres est une erreur. Ne pas faire jouer (Diogo) Jota ou (Gonçalo) Ramos en est une autre. C’est une équipe de compromis, pas la meilleure possible ! La Ligue des Nations ne m’inspire pas, mais les matchs contre le Danemark m’avertissent que le Portugal va mal et qu’il s'est égaré. La réponse disproportionnée de Martinez à un journaliste le confirme. Je sais que je suis sévère, mais si l’Espagnol n’est pas capable de transformer l’équipe nationale en véritable équipe, il devrait peut-être envisager un autre métier. »
Malgré ces critiques acerbes, l’avenir de Roberto Martinez ne semble pas menacé. Record confirme que l’Espagnol ne court aucun risque auprès de la fédération portugaise (FPF). Ce dernier avait déjà balayé d’un revers de main les reproches après la défaite au Danemark. « J’ai commencé à entraîner en 2007. J’ai perdu mes cheveux et beaucoup de choses ont changé. Cela fait partie de mon rôle. Je suis ici pour aider avec mon expérience, j’ai plus de 100 matchs internationaux à mon actif. Je souhaite le meilleur pour les joueurs et pour le Portugal. J’ai beaucoup de pression, mais elle est interne. La performance contre le Danemark n’a pas été à la hauteur et je me mets la pression maximale. Nous sommes une équipe très soudée et forte. Nous avons le soutien de tous les membres de la Fédération, et nous devons maintenant nous appuyer sur nos supporters pour battre le Danemark. L’adversaire, c’est le Danemark, pas la pression externe. (…) Je vais être très honnête : je ne regarde rien, je ne lis rien. Mon rôle consiste à préparer les joueurs et à évaluer le match dans les 72 heures. Les critiques font partie du job. » Roberto Martinez assure rester solide, mais au Portugal, la grogne monte.