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Les binationaux suscitent des tensions en Belgique

C’est la preuve que la Belgique a rétrogradé dans la hiérarchie des nations. Elle s’apprête à retrouver le terrain jeudi, lors d'un barrage aller-retour contre l’Ukraine, afin de tenter de sauver sa place en Ligue A. C’est également le moment de commencer une nouvelle aventure avec de nouveaux visages. Rudi Garcia prendra place sur le banc à la suite de Domenico Tedesco, dont le mandat a été un échec retentissant. À sa décharge, l’entraîneur italo-allemand est arrivé à un moment difficile, à la fin de la génération dorée menée par Hazard, De Bruyne et Lukaku, et dirigée par Roberto Martinez.

Cette période faste est aussi symbolisée par l’intégration réussie de joueurs binationaux qui ont marqué l'histoire des Diables Rouges. En plus de Lukaku, Vincent Kompany a été l’un des leaders de cette génération. Le capitaine belge de la Coupe du monde 2018, d'origine congolaise, était entouré d'une pléiade de joueurs ayant double nationalité, tels que Nacer Chadli, Marouane Fellaini (Maroc), Moussa Dembélé (Mali), Axel Witsel (France), Adnan Januzaj (Kosovo), Yannick Carrasco (Espagne), Dedryck Boyata, Michy Batshuayi et Youri Tielemans (Congo). Comme dans d'autres pays, ce double passeport devient problématique aujourd'hui.

En quelques semaines, la Belgique a vu trois jeunes joueurs, passés par ses sélections, opter pour une autre nationalité sportive. C'est le cas de Matias Fernandez-Pardo, originaire de Bruxelles, qui ne pourra pas rejoindre les espoirs espagnols en raison d'une blessure. Âgé de 20 ans et international belge depuis les U15, il a choisi de représenter la Roja. Il en va de même pour Konstantinos Karetsas (17 ans), qui a été convoqué pour la première fois par la Grèce la semaine dernière, alors qu'il évoluait encore avec les Diablotins en novembre dernier.

Enfin, le coup de grâce a été porté par Chemsdine Talbi (19 ans). Impressionnant cette saison et mis en lumière par la Ligue des Champions, l'ailier du Club Bruges a décidé de jouer pour le Maroc, où Walid Regragui l’a appelé dans sa dernière sélection. Le dernier effort de Vincent Mannaert, le nouveau directeur technique national, n’a pas suffi à inverser la tendance. « La fédération belge doit mieux travailler. La Grèce, le Maroc et d'autres pays s'impliquent bien plus qu'auparavant. Nous nous réveillons trop tard. Il y a quelques discussions, mais ce n'est pas suffisant », a confirmé Nordin Jbari, premier international belge d’origine maghrébine, consultant aujourd'hui.

Ces échecs laissent des traces à la fédération et ont déjà causé une victime. Début mars, celle-ci a décidé de se séparer de Kevin Vermeulen, ancien scout d’Anderlecht qui était responsable des jeunes binationaux depuis plus d’un an. Il fait les frais de la colère des instances, mais surtout du manque de résultats. Une réévaluation de la méthode s'impose. Les nouveaux dirigeants de la RBFA ont fait de ce sujet une priorité pour les années à venir, car d'autres jeunes talents belges sont dans le viseur de différents pays. Rayane Bounida est sollicité par le Maroc, et Stanis Idumbo est ciblé par la France. Vincent Mannaert a dû s'exprimer fermement lors d'une conférence de presse.

« Ils sont nés ici et ont fait leur éducation en Belgique, où les clubs ont investi beaucoup de temps et d'énergie. S'ils ne peuvent pas choisir la Belgique, c'est leur droit, mais nous continuerons avec les joueurs qui souhaitent représenter notre équipe », a déclaré le DTN, qui ne retiendra que ceux ayant envie de porter le maillot des Diables. « Nous voulons associer le maximum de talents à la Belgique », mais « nous leur demandons clairement de choisir ou non la Belgique », a-t-il ajouté, en se montrant plus ferme envers ceux qui hésitent trop longtemps à son goût.

« Je conseillerais à ceux qui hésitent de faire des choix. S'ils choisissent la Belgique, nous en serons ravis. S'ils optent pour un autre pays, nous respecterons leur décision. Nous le préciserons clairement avant de faire une sélection. » Le message est clair pour les générations futures, qui seront probablement pressées de choisir leur nationalité sportive plus rapidement que leurs aînés. La fédération souhaite surtout éviter de reproduire les récentes déconvenues et mieux « apprendre de ces déceptions. » Rudi Garcia, de façon évidente, est en première ligne. Il aurait d’ailleurs sélectionné Chemsdine Talbi ou Konstantinos Karetsas dans sa liste de 26 joueurs.

« Nous ne ferons pas de débat aujourd'hui sur les binationaux », se défendait-il lors d'une conférence de presse en début de semaine. « Il est vrai qu'ils ont le choix. Nous devons respecter leur décision. Nous devons également faire notre propre introspection. Avec Vincent Mannaert, nous sommes là depuis peu pour influencer leurs choix. Mais oui, l'un des deux aurait été dans la sélection. Bonne chance à eux», a regretté le sélectionneur, qui souligne aussi « l'importance de la fibre patriotique ». « Peu importe votre âge ou votre palmarès, vous devez venir avec enthousiasme en sélection. C’est une fierté de jouer pour son pays. » Le cap est clairement fixé.